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Immigration économique et nouvelles possibilités de régularisation pour travailleurs immigrés

L’intention du gouvernement est clairement affichée depuis la loi Sarkozy de juillet 2006 comme visant l’introduction de nouvelles règles pour l’immigration économique. Le rapport de la commission Attali pour la libération de la croissance qui sera remis au Président de la République le 23 janvier 2008 devrait mettre l’accent sur la relance de l’immigration libérale avec moins de frontières juridiques. Ce rapport a été demandé par le président de la république à l’ancien conseiller du Président Mitterrand.

Selon les premières informations, les rédacteurs du rapport ont mis l’accent sur une réalité : un marché du travail en tension avec un taux de chômage élevé et des entreprises qui peinent toujours à trouver une main d’œuvre disponible dans certains secteurs d’emplois. La France devra recourir à la main-d’œuvre étrangère, de plus en plus nombreuse dans les années à venir. Selon une note de Bercy la France sera confrontée à des besoins de recrutement évalués à 750 000 par an d’ici l’horizon 2015. La présentation de l’immigration par la commission Attali bouleverse alors l’image des étrangers en France en insistant sur une réalité économique en considérant que l’immigration est un facteur de développement de la population, et donc en tant que telle une source de création de richesse et donc de croissance. C’est donc là une réalité économique qui est remise à l’ordre du jour à la place de l’appréciation politique et partisane qui prévalait jusqu’à présent au sujet de l’immigration et des étrangers.

Pour Jacques Attali «La France a besoin d’immigration, il faut s’ouvrir aux travailleurs d’Europe de l’Est, aux Chinois, aux pays d’Afrique. Sans cela, toutes nos belles discussions sur le financement des retraites n’auront pas de sens.» L’opinion est clairement posée. Espérons qu’elle sera entendue par les préfectures…

Comme nous l’avons souvent dit dans ce blog, ces questions de régularisation doivent être encadrées par le Droit et ne pas être laissées à l’appréciation de considérations politiques des Commissions (aussi prestigieuses soient-elles) ou encore de l’Administration sans que des règles précises soient mises par écrit. Redonner place au Droit permet donc de limiter l’arbitraire et l’appréciation souvent manifestement contraire aux intérêts des étrangers…

Deux circulaires sont venues récemment apporter quelques précisions sur l’encadrement juridique des régularisations de travailleurs étrangers. Nous reviendrons prochainement sur une récente circulaire de janvier 2008 concernant l’admission exceptionnelle au séjour (plus simplement la régularisation) de travailleurs étrangers.

Nous apportons ci-dessous quelques informations concernant la première d’entre elle : la circulaire du 20 décembre 2007.

En novembre 2007, le Gouvernement français a approuvé deux listes de métiers connaissant des difficultés de recrutement et pour lesquels la situation de l’emploi ne sera pas opposée.

On entend par « opposition de la situation de l’emploi » le contrôle opéré par l’Administration lors de la demande de titre de séjour « salarié ». Par ce contrôle, les services du Bureau de la main d’œuvre étrangère du ministère de l’Emploi peuvent refuser de délivrer un titre de séjour au travailleur étranger même si celui-ci fait état d’une promesse d’embauche ferme de la part d’un employeur français. Pourquoi ? Par simple référence aux statistiques de l’ANPE regroupant les offres et demandes d’emploi pour un même métier et pour une zone géographique donnée en considérant qu’il y a suffisamment de demandeurs d’emplois nationaux sur des métiers précis et que la main d’oeuvre étrangère n’est pas nécessaire.

Les règles sont aujourd’hui assouplies par la circulaire du 20 décembre 2007.

Il existe cependant encore deux régimes différents. Le premier pour les étrangers provenants de certains pays de l’Union européenne. Sont visés ici principalement les nouveaux pays entrants (ex républiques russes de la Mer Baltique : Estonie, Lituanie…et de l’Europe de l’Est : Roumanie, Bulgarie…).

Pour ce qui concerne les nouveaux pays de l’Union européenne

Depuis mai 2006, les règles ont été assouplies pour les travailleurs de l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Hongrie, la Pologne, la République tchèque, la Slovaquie et la Slovénie avec une possibilité d’accorder la carte de travail pour 61 métiers sans vérifier ou opposer la situation de l’emploi en France sur ces 61 métiers (voir la circulaire du 29 avril 2006 ci-dessous).

La liste initiale de 61 métiers est désormais complétée de 89 métiers supplémentaires permettant ainsi aux

ressortissants des dix nouveaux États membres précités d’exercer en France une activité salariée dans

150 métiers sans que la situation de l’emploi ne leur soit opposable sur le fondement de l’article L.341-2

du Code du travail.

Ces 150 métiers représentent 40% du total des offres d’emploi enregistrées par l’ANPE en 2006, soit 1 371 931 offres d’emploi, et couvrent désormais la presque totalité des domaines professionnels des registres de l’ANPE (soit 17 sur 22).

Pour ce qui concerne les ressortissants de pays tiers (tout pays en dehors de l’Union européenne)

La liste est bien plus courte. On passe à 30 métiers pour toute la France et quelques autres métiers se rajoutent se rajoutent par Région. On reste loin des 150 métiers ouverts aux européens de l’Est et la liste vise des métiers à haute et moyenne qualification en général. Nous renvoyons pour une liste complète au tableau annexé à la circulaire que vous trouverez à la fin de cet article. Un regret a été exprimé par les chefs d’entreprises du BTP: les métiers autorisés visent des postes d’encadrement ou de design et pas du tout pour les postes de production alors que c’est bien dans ce sous-secteur du BTP que le besoin de main d’oeuvre se fait le plus pressant. Comme dans les années 60 et 70 en France, c’est encore aujourd’hui pour les petits boulots pour ne plus dire les sales boulots que le besoin est le plus pressant.

Pour ce qui concerne les tunisiens et algériens

Si la circulaire indique au passage que ces nouvelles règles ne sont pas applicables aux ressortissants algériens et tunisiens cela ne veut pas dire qu’ils ne peuvent pas en bénéficier. Bien au contraire, les règles internationales établies entre la France et l’Algérie et la Tunisie sont plus favorables et ne permettent pas de limiter la possibilité de travailler à une région déterminée. En réalité cette remarque a été rendue nécessaire pour ne pas porter atteinte à la légalité du texte de la circulaire. En pratique tunisiens et algériens peuvent tout à fait invoquer la circulaire dont le bénéfice ne pourrait leur être refuser. Le gouvernement fait état de négociations à venir mais pour l’instant le texte de la circulaire est une solution qui pourrait aussi être appréciée des algériens et tunisiens en France. Il ne faut donc pas hésiter à l’invoquer.

Pour certains pays comme le Gabon, le Sénégal, le Congo, le Bénin, les Philippines…

Au-délà des métiers précisés dans la circulaire le Gouvernement annonce dans sa circulaire que des listes de métiers plus longues pourraient être adoptées à l’avenir pour certains pays : Gabon, Sénégal, Congo, Bénin, Tunisie, Philippines. Ces listes rallongées devront cependant faire l’objet d’un accord international et d’une adoption par le parlement français….processus qui pourrait donc prendre quelques temps.

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